De phrases musicales en temps retrouvés, du salon de Mme Verdurin aux canaux de Venise, de Couperin à Franck, notre professeur s’est replongé dans la Recherche et nous invite à suivre les traces de son narrateur.
« Eh bien c’est entendu, dit Monsieur Verdurin, il ne jouera que l’Andante.
– Que l’Andante! comme tu y vas! s’écria Madame Verdurin. C’est justement l’Andante qui me casse bras et jambes ! »*
Soit ! Préparons donc notre cachet de Doliprane… Étant donné que, à l’instar de Madame Verdurin, nous sommes d’une grande sensibilité musicale, nous aurons certainement la migraine en étudiant cet Andante de Beethoven…
Le relief montagneux du chant
Le chant se déploie sur 8 mesures. Sentez les sommets aigus de cette phrase : elle s’élance d’abord vers le do (ne jouez pas encore fort). Puis, jusqu’au mi (mesure n°4). Ensuite, au fa# et enfin au sol#. En général, lorsque la musique se hisse vers l’aigu, il faut jouer plus intensément et, au contraire, diminuer vers les graves. Construisez le relief de cette phrase avec ses différentes hauteurs, en utilisant le poids et la résistance de vos doigts.
Double-notes
Jouez-les très ensemble. Ce n’est pas évident car nos doigts ne sont pas tous de même longueur! Écoutez-vous. Ne manquez aucune note grave : tendez votre doigt et ne laissez pas votre main s’écrouler vers le 5e doigt. Mesure n°2, le fa# du milieu constitue la partie la plus grave (avec la au dessus.) Puis il devient la note aiguë de la tierce (avec ré en dessous). Rejouez ce fa#, laissez remonter sa touche, sinon on ne sent pas l’empreinte dans la main !
Basses d’Alberti.
Mesure n° 16, la m. gauche joue en doubles croches deux voix distinctes: la ligne des basses, la, do, mi, do ré, si, ré, si… nuancez cette ligne comme si vous la chantiez : ne jouez jamais deux notes à la suite avec le même son. Par ailleurs, un fa est répété au pouce. Ne le jouez pas fort, relaxez votre doigt. Jouez le tout très legato (lié), en glissant de la basse vers le pouce. Sentez le petit mouvement de balancier de l’avant-bras.
*Marcel Proust, Du côté de chez Swann, II, éd. Gallimard de 1919, p. 179.