Muzio Clementi Sonatine op. 36, n° 2 (1er et 2e mvts)
☞ NIVEAU DÉBUTANT / CD PLAGE 5
Vladimir Horowitz s’est arrêté parfois de jouer du piano, notamment de 1953 à 1965. Mais sa curiosité pour Clementi et pour Scarlatti le fit renaître. Il transforma son salon en studio : « J’ai recommencé avec Clementi. » Wanda, ombrageuse, certifie que son Volodia ne jure plus que par Clementi. Il fut « injustement mis dans l’ombre par Mozart; et Beethoven l’aurait aimé », ajoute-t-il. Cette Sonatine en sol majeur est aimable et gaie. Comme nous l’avons vu dans le morceau précédent, pesez dans le ré de la 1re mesure, glissez et allégez le si auquel il est lié.
Ce « soupesage » est vraiment à l’origine de la technique du piano.
1er mouvement : votre m. gauche contient des va-et-vient de croches. Comme dans le morceau de Gurlitt, ne la jouez pas sans réfléchir, mais apprenez le renversement de l’accord. Ex : le fa de la mes. n°3 (5e doigt) est la tierce de l’accord de ré. Cela est très important car un renversement d’accord ne doit pas être assis ni alourdi avec la main, mais allégé. Il exprime le « provisoire ». Voilà ce qu’est l’interprétation d’un morceau !
➜ Mes. n°8 et 12 : la basse est ré. Nous venons du ton principal : sol et allons vers celui de ré. Mais nous restons en voyage : là encore, il ne faut pas s’asseoir, ni écraser. Soyez léger de la main ! Nous n’arriverons à destination que mes. 22, après avoir « passé la frontière » annoncée par son « douanier » : la cadence parfaite. Dans la technique du piano, il faut faire vivre le corps avec le voyage de l’harmonie, de la tonalité.
2e mouvement : ce très bel allegretto est tendre et cantabile. Là aussi, « chantez-le avec les doigts ». Il faut jouer dolce, mais projetez quand même votre note longue (blanche) à la m. gauche, afin que le son parvienne jusqu’au 3e temps. Mes. n° 5 : lancez cette fois la blanche à la m. droite afin qu’elle habille le chant qui passe à gauche.
➜ Plans sonores dans une main : et maintenant, un bon exercice musical et technique: partagez votre m. gauche en deux. Faites sonner la basse avec un peu de poids, résistez avec votre doigt (4e puis 5e doigt, 3e et 5e) et atténuez les doigts internes (2e et pouce). L’indépendance des doigts dans la main, un beau secret !
➜ Voyage musical : ici aussi, construisez votre interprétation sur le voyage harmonique. Mes. n° 9, Clementi nous attire vers le ton triste de la mineur. Puis,
il nous prend par la main et nous conduit vers sol majeur. Certes, ce n’est pas bien loin : cinq notes plus haut (disons que c’est encore dans l’espace Schengen !) Attendez la cadence parfaite, mes. n° 15 : do-ré-ré/ sol (la frontière) pour vous reposer un peu du voyage et vous asseoir musicalement et brièvement. Mais ce n’est qu’une halte provisoire : ne plantez pas la tente ! Repartez en ut mes. n° 16, comme au début. J’affirme que ce ressenti du voyage musical, avec l’exacte évaluation des différents degrés de poser ou d’avancer harmoniquement, est l’un des points les plus fondamentaux dans la technique du piano, et que c’est notamment la grande clé pour jouer Mozart …ou Clémenti !