Elles sont le véhicule indispensable de la mélodie et de l’harmonie…

Jusqu’à Debussy, chaque œuvre pour piano est écrite dans une tonalité spécifique : une gamme de sept notes pouvant avoir des dièses et des bémols. Inscrite en début de système, la fameuse « armure » précise quelles sont les notes auxquelles s’appliquent ces « altérations ». Mais les compositeurs ne se contentent pas de cette tonalité et vont utiliser dièses, bémols et bécarres à foison pour faire voyager harmoniquement l’auditeur.

Exercice 1

Apprendre une partition, c’est aussi apprendre les altérations. Dans ce processus, il peut être intéressant ne pas les jouer pour ensuite comprendre leur intérêt. Essayez de jouer l’extrait ci-dessous sans aucune altération accidentelle. Leur absence perturbe tout le discours harmonique conçu par Rachmaninov. En effet, l’extrait est en do mineur. Et en do mineur, il FAUT un si bécarre, l’altération accidentelle nécessaire. Plus loin, un si bémol apparaît. L’interprète devra faire sentir la différence entre ces deux notes qui colorent ce do mineur. Quelles sont les trois tonalités suggérées dans cet extrait ?

Rachmaninov Variations sur un thème de Chopin op. 22 (variation 1)

Exercice 2

Mais les altérations accidentelles n’ont pas qu’une fonction harmonique. Il faut comprendre le mouvement mélodique sous-jacent. Dans cet extrait de la Première étude op. 33 de Rachmaninov, un la bécarre apparaît. Même s’il s’explique harmoniquement (dominante de l’accord suivant de si bémol mineur), l’intérêt est surtout dans la conduite horizontale des voix. Ainsi malgré l’écriture verticale en accords plaqués, nous pouvons imaginer une véritable ligne chromatique (la bémol, la bécarre, si bémol). Jouez l’extrait legato comme suggéré ici :

Rachmaninov Études-tableaux op. 33, n° 1

Conclusion 

Les altérations harmoniques sont un élément essentiel du discours musical. C’est grâce à elles que les compositeurs explorent plusieurs tonalités au sein d’un même morceau. Leur importance harmonique et mélodique est indispensable jusqu’à l’abolition de la tonalité, mais c’est une autre histoire.