Par la grâce de notre jazzman, Orphée troque sa lyre pour un piano et Gluck rencontre Thelonious Monk. Laissez-vous porter par la mélancolie de cette mélodie et partez à la recherche d’Eurydice en revisitant le mythe à votre façon.
Bonjour à tous. Voici une célèbre mélodie issue de l’opéra Orphée et Eurydice de Christoph Willibald Gluck, qui a été magnifiquement transcrite au piano par Giovanni Sgambati. C’est un chant mélancolique, d’une profonde émotion, dans lequel la mélodie nous irradie de sa lumière et de sa force. Par rapport à la version connue de Sgambati où l’accompagnement est assez fourni, je vous propose ici un accompagnement plutôt en noire à la main gauche. L’une des priorités sera de bien équilibrer les différents plans sonores. Il faudra que la mélodie se distingue bien de l’accompagnement et de la basse tout en conservant une forme d’unité.
Orphée et Eurydice, de Gluck par Paul Lay
Mon arrangement est découpé en trois parties.
La longue mélodie originale (qui commence partie A) est entrecoupée d’une petite section improvisée partie B, puis la mélodie reprend à lettre C.
✔ Il est important d’instaurer un climat plein de solennité et d’intériorité dès le début.
INTERPRÉTATION
✔ Bien chanter la mélodie, bien la porter.
✔ Notre travail portera beaucoup sur la main gauche, il faut trouver une densité dans les accords sans avoir à les jouer fort.
✔ La mélodie est soutenue avec quelques accords qui sont aussi joués à la main droite. Deux figures essentielles du piano jazz seront des sources d’inspiration : Jelly Roll Morton et Thelonious Monk. Ils ont cette particularité d’agrémenter de clusters la main droite sous la mélodie (par ex., mesure 5).
IMPROVISATION
Tout d’abord, nous allons créer l’atmosphère qui nous plaît pour ces deux premières mesures qui constituent l’introduction, par des clusters – inoffensifs ceux-là. Un cluster est un agrégat de notes souvent très proches entre elles formant un accord. Ici, on va exprimer ré mineur en jouant les notes essentielles de l’accord: ré-fa-la complétées par des notes de la gamme ou approches chromatiques.
Voici des exemples ; cherchez les vôtres. Le tout est de créer un climat qui vous plaît. Piochez parmi ces exemples et laissez-les résonner tout en jouant la main gauche.
L’accompagnement de ce morceau (mg) consiste en une alternance de basses et d’accords sur un rythme à trois temps. Pour approfondir ce climat singulier que nous cherchons à obtenir, je vous propose de tester plusieurs manières de phraser la main gauche, notamment par le dosage de la pédale. Il faut chercher plusieurs combinaisons. Nous pouvons mettre la pédale sur chaque mesure et la relever à la fin de chacune d’entre elles lorsque l’harmonie change, mais aussi créer des ruptures, en piquant la basse du premier temps, ou en piquant le deuxième ou troisième accord. Voir l’articulation de la séquence 2. Cela crée vraiment une nouvelle dynamique au morceau, et rend l’interprétation encore plus spontanée.
Lorsque nous arrivons à la section B pour l’improvisation, je vous propose cette fois d’improviser sobrement avec des clusters en fa majeur afin de retrouver le climat du début, et des notes issues de la gamme de fa majeur. Voir la séquence 3.
À bientôt et bon travail !