Hélène Mercier et Louis Lortie, complices de longue date, se lancent dans une intégrale de l’œuvre pour quatre mains et deux pianos de Debussy. Ce premier opus (trois autres sont attendus) mêle œuvres originales, raretés et transcriptions de Gustave Samazeuilh, André Caplet ou Léon Roques. Leur jeu diapré épouse à l’unisson les mille reflets de cette musique et nous éblouit de bout en bout. Le duo fait des merveilles dans la Petite Suite, œuvre qu’ils fréquentent ensemble depuis l’enfance.

Ils nous entraînent « En bateau » au rythme de la barcarolle, dans un flux tranquille et régulier, paré d’un halo nostalgique. La Première Arabesque dans une transcription pour deux pianos confirme cette fusion musicale : un art de la nuance et du legato qu’ils ont en commun. Autre ambiance avec les six Épigraphes antiques, où les pianistes décrivent, dans cette musique subtilement dissonante aux sonorités flûtées, un climat fantasmagorique et nimbé de mystère. Par un jeu d’échos et de résonances, ils nous transportent entre les colonnes des temples doriques. Leur chant immuable, intemporel est magnifié par un Bosendörfer généreux et profond dans les graves, scintillant et ailé dans les aigus. Au charme de l’Andante cantabile succède La Mer, point culminant de ce disque. Il serait réducteur de parler d’une vision simplement orchestrale. Elle est bien plus que cela et les interprètes s’approprient chaque détail de la partition, les harmonies mouvantes, la complexité rythmique, la richesse, la subtilité des timbres, pour nous offrir la beauté d’un chant qui se déploie sans retenue.

Louis Lortie, Hélène Mercier
CHANDOS