Pour ce concert de clôture des Rencontres Musicales d’Évian, le titan russe du piano se lance dans un programme dans lequel il révèle un autre visage, plus intérieur et plus secret. Subtilité et lyrisme dans une première partie qui défend les associations improbables de trois langages distincts du post-romantisme. La salle s’emplit de lumière nocturne dès l’ouverture de la Sonate de Berg, départ d’une exploration subjuguante dont l’intensité est magnifiée par l’immense expressivité du pianiste.
Viennent ensuite les œuvres peu connues de Khrennikov, les 5 Pièces et la Danse op. 5 n°3, qui ravissent par leurs harmonies piquantes et leurs envolées nostalgiques. La brillance et la virtuosité y sont, mais dénuées de tout artifice pour dévoiler une simplicité attachante qui imprègne également les Préludes de Gershwin.
Tout s’anime sous les doigts de cet artiste phénoménal, qui sculpte des strates de couleurs et des timbres somptueux avec une rare inventivité qui s’avère aussi éblouissante dans la deuxième partie consacrée à Chopin. Ses lectures atmosphériques dans le Nocturne op.62 n°1 et les Trois Impromptus tiennent
le public en haleine. Enfin, un message puissant se distille entre le 1er scherzo et la Polonaise « Héroïque », des œuvres dont l’interprète s’empare avec sa force virtuose, pour clore ce récital exceptionnel.

Crédit photo : Sven Lorenz