Retour sur la première édition du concours consacré aux pianistes professionnels qui s’est tenue en juillet dernier. 

La chaleur conviviale des passionnés de piano

Sur la plage de l’Écluse de Dinard, dans cette anse profonde où s’accrochent des villas de luxe sur des parois rocheuses à donner le vertige, se tient le Palais des arts et du festival, une construction des années 1970, quasiment les pieds dans le sable.

En cette veille de 14 juillet, les vacanciers profitent de la lumière mordorée de fin de journée. C’est dans cette atmosphère estivale que se déroule le tout premier concours de piano amateur de Dinard. La manifestation est adossée au festival de musique classique qui se tient chaque été, sous la direction de Claire-Marie Le Guay.

Au bord de l’eau comme dans la salle, l’atmosphère est chaleureuse et conviviale. Une poignée de passionnés de piano en congés dans la région, parents, amis des candidats, ou même leurs professeurs, occupent les rangées.

Crédit photo : Y. Le-Gall

Pour cette édition inaugurale, les participants ont été sélectionnés sur vidéo, par un jury composé de Claire-Marie Le Guay, Émilie Munera, productrice à France Musique, et le pianiste Bruno Rigutto, longtemps professeur au CNSM.

Le premier candidat arrive et déjà on s’interroge sur ce qu’on attend de lui, des autres dont les noms s’alignent sur le programme. Les amateurs n’ont pas forcément l’habitude de la scène, du trac, et s’exposer ainsi en public demande un certain cran. Qu’est-ce qui motive ces musiciens dans l’âme de 23 à 76 ans à monter sur scène ? Sûrement un défi personnel, un certain goût du partage et, toujours, l’amour de la musique.

Heureux d’être là

Philippe Delorme, ingénieur canadien de 55 ans, a choisi un extrait du Thème et Variations de Fauré. Ses mains hésitantes frayent malgré tout un chemin sensible et touchant. Il s’est remis au piano il y a deux ans, après avoir surmonté un accident cérébral. Camille Bruneau, avocate fiscaliste de 32 ans, ex-championne européenne de patinage artistique quittera la scène au milieu de la Sonate K. 27 de Scarlatti, avant de surmonter sa peur et de revenir courageusement, plus tard, interpréter des œuvres de Felix et Fanny Mendelssohn.

Entre-temps, Jean-Christophe Lemoine, chef de projet de 42 ans, a interprété Bach et Debussy tandis que Louis Abraham, jeune polytechnicien de 23 ans, nous a impressionnés dans Musical Toys de Sofia Goubaïdoulina suivi de l’Andante Spianato et la Grande Polonaise brillante de Chopin.

Derrière chaque candidat, il y aurait une histoire à raconter. Comme celle de Paul-Hubert des Mesnards, qui, à 76 ans, vigoureux, joue le finale de la Sonate op. 109 de Beethoven. On le sent heureux d’être là, d’interpréter cette musique qu’il fréquente sûrement depuis longtemps déjà.

Le bal s’achève avec Caroline Daas, hôtesse de l’air chez Air France de 53 ans, longue robe noire, allure à la Delphine Seyrig. Elle nous éblouit par sa fluidité et sa musicalité dans l’Allegro de concert de Granados et la Toccata de Debussy. C’est à elle que reviendront le prix du jury et le prix du public. Louis Abraham sera gratifié du prix de la compositrice. Si la déception se lit sur les autres visages, Bruno Rigutto aura pour chacun un mot bienveillant, à l’image de ce concours à qui on souhaite une longue vie !