C’est la rentrée ! Et cette année, c’est décidé, votre enfant se met au piano. Alors, par où commencer ? Où faut-il l’inscrire, et quel instrument acheter ? Nous avons interrogé des professeurs de conservatoire, d’école privée ou indépendants afin qu’ils répondent à toutes les questions que vous pouvez vous poser.

Y a-t-il un âge idéal ?

Si l’on veut faire de la musique en amateur, on peut commencer le piano à tout moment, et les années ne doivent en aucun cas être un frein. Cela étant dit, l’âge de 5 ans passe souvent pour être parfait. « À […] l’âge où les enfants rentrent au CP, il y a quelque chose de très particulier qui se développe », nous explique Laura Fromentin, pianiste à l’Opéra de Rouen et professeur indépendant. « C’est le moment de l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour les enfants, et il se crée des connexions dans le cerveau qui sont idéales pour commencer à apprendre le langage musical », ajoute-t-elle.

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Quels sont les prérequis ? Faut-il absolument faire de l’éveil musical ?

Aucune préparation particulière n’est nécessaire, on n’attend pas du débutant qu’il ait déjà des rudiments de piano, de solfège ou d’histoire de la musique ! En revanche, une chose est centrale : la capacité d’écoute. « C’est le même pré requis que pour apprendre à parler, remarque Frédéric Aguessy, professeur au conservatoire de Rouen. C’est-à-dire qu’il faut savoir entendre. » Un apprentissage qui doit se faire bien en amont et qui ne se résume pas à l’écoute de la musique.

« Il faut savoir écouter les bruits de la nature, les autres quand ils parlent, souligne Christine Marchais, professeur de déchiffrage à l’École normale de musique de Paris. Il faut à la fois avoir envie de chanter et de bouger, être libre dans son corps, mais aussi développer une forme de calme et d’attention, une écoute avec bonheur. »

« L’idéal, c’est peut-être d’entendre de la musique in utero, renchérit Frédéric Aguessy. Et d’entendre les parents chanter ou jouer avant la naissance. D’une certaine manière, la musique ne se commence pas seulement avec un instrument entre les mains. C’est d’abord l’entendre, puis l’écouter, et enfin la faire, en chantant, en frappant dans ses mains, en dansant… » En ce sens, l’éveil musical au sens large est recommandé pour faire travailler l’écoute, le mouvement dans l’espace, le chant et la danse. Tant que cela est fait de manière légère et ludique !

Faut-il privilégier le conservatoire ou les cours particuliers ?

Lorsque le choix se présente, il dépendra essentiellement du profil et de la sensibilité de l’élève. Le conservatoire présente l’avantage d’offrir une culture musicale très complète et de permettre une émulation entre les élèves. Selon Frédéric Aguessy, « pouvoir assister ou participer à toutes sortes de concerts ou d’activités culturelles et musicales, c’est un moyen de formation indispensable. Le bouillon de culture que peut représenter un conservatoire est souvent difficilement remplaçable pour tous ceux qui ne vivent pas dans des familles où la vie musicale est intense. Et il faut bien reconnaître également que pour beaucoup d’enfants ou d’adolescents, le conservatoire devient un lieu de vie à part entière ».

Pour autant, le conservatoire ne convient pas à tous les profils. Certains élèves très demandeurs peuvent se retrouver frustrés car l’enseignant peut ne pas leur accorder autant de temps qu’il le faudrait. D’autres peuvent se trouver submergés par le système, et ils préfèrent l’intimité des cours particuliers, qui offrent des horaires plus flexibles et une relation plus personnelle avec le professeur. Il est d’ailleurs très courant de commencer avec des cours particuliers pour ensuite rejoindre un conservatoire. Au-delà de la structure, c’est de toute façon la qualité de la rela tion entre l’enfant et son professeur qui est primordiale. Pour Laura Fromentin, « le travail avec les débutants, c’est 80 % d’affectif ». Le contact avec le professeur est donc bien plus important que le choix de l’institution !

Doit-on acheter un piano ?

S’il n’est guère possible de faire autrement que d’avoir un piano chez soi lorsque l’on commence les cours, il n’est pas nécessaire d’investir immédiatement dans un instrument onéreux. Plusieurs options s’offrent à vous. D’abord, le numérique. Idéal quand on a peu d’espace ou quand les voisins sont peu accommodants. Il ne peut cependant pas être une solution à long terme. En effet, le son est synthétique, et les harmonies, souvent trompeuses. Quant aux touches, elles manquent généralement de dynamique. Une des meilleures solutions à plus long terme consiste donc à louer un piano acoustique. Pour un piano vertical, comptez autour de 40 D par mois. Une manière abordable de prendre les bons réflexes !

Faut-il commencer le solfège ?

L’apprentissage des notes est incontournable. « En piano, à cause du grand nombre de notes, il faut très vite apprendre à lire et exercer dès le début la mémoire des textes, sinon on perd un temps fou », observe Christine Marchais. Alors, comment faire? « Mes tout-petits apprennent le solfège sans même s’en rendre compte », s’amuse Laura Fromentin. Tout l’apprentissage des notes est lié au jeu et s’inspire directement de l’imaginaire des enfants. « C’est lourd et difficile, tout cet apprentissage. Il faut faire en sorte que la lecture soit ludique. On fait donc jouer son imagination : on attribue un personnage à chaque note, on leur invente une petite histoire… Et en un rien de temps, la lecture devient une amie et partenaire! », ajoute le professeur.

Quel est le rôle des parents ?

Si les parents sont des acteurs clés de l’éveil musical, ils ont aussi un rôle à jouer dans l’accompagnement du débutant. D’ailleurs, on les convie souvent à assister aux cours des petits. « Je demande beaucoup de présence et d’investissement au début pour que tout le monde comprenne comment il faut travailler, et quelle méthode utiliser, explique Laura Fromentin. Les parents, lors des premiers cours, c’est presque les assistants du professeur ! » Pour autant – et heureusement! –, il n’est pas nécessaire que les parents soient eux-mêmes
musiciens. « Le plus souvent, il suffit de suggérer à son enfant d’aller travailler son piano pour faire la différence, remarque Frédéric Aguessy. La présence et les encouragements sont cruciaux. En tout cas, quand les parents sont présents, cela se sent. »

À quoi ressemble un cours pour débutant ?

À votre enfant et à son professeur ! Pour les débutants, les professeurs s’appuient souvent sur un mélange de différentes méthodes, qui varient en fonction de l’âge et de la vitesse d’apprentissage. Christine Marchais recourt par exemple à un cocktail « d’exercices techniques courts et utiles pour toute la vie, de petits morceaux faciles et bien harmonisés, et de pièces à quatre mains pour entraîner l’oreille, la réactivité et le déchiffrage ».

L’ingrédient secret ?

Des pièces contemporaines. « Les enfants adorent. Il y a d’innombrables pièces formidables, comme celles de Kurtag, qui permettent de réellement s’approprier l’instrument : on va explorer l’intérieur du piano, taper sur les cordes, jouer avec la caisse de résonance et les vibrations… Cela permet de développer un rapport vraiment décomplexé à l’instrument », note-t-elle. « La plupart des enfants apprennent en faisant, acquiesce Frédéric Aguessy. Et c’est en jouant que l’on devient pianiste. » Le professeur s’adapte donc à chaque élève pour lui faire travailler des points particuliers : l’écoute, la mémoire, la solidité de la main, la vélocité… et très vite des petits morceaux, « car il ne faut pas oublier que le but est de jouer et de trouver que ce que l’on fait est beau ».

Un dernier conseil ?

« Travailler l’écoute! Quels que soient l’âge et l’instrument, c’est la qualité numéro un d’un musicien », affirme Frédéric Aguessy. Pour Laura Fromentin, il s’agit aussi d’écouter son enfant : « On peut parfois être trop exigeant envers [lui]. Il faut lui laisser le choix dans les morceaux, lui demander ce dont il a envie, et surtout mettre au centre la notion de plaisir. » Et Christine Marchais de conclure: « Il faut toujours conserver la joie d’apprendre ! »