À l’occasion de la parution de son CD consacré aux Variations Goldberg, le pianiste français revient sur les pianos de sa vie.
Mon piano d’enfance
Mon premier piano était un piano droit, un Fazer. Mes parents l’avaient acheté pour mon frère aîné, qui a étudié le piano avant moi. J’ai commencé la musique vers 4-5 ans et j’ai travaillé dessus jusqu’à l’âge de 11 ans, lorsque mes parents m’ont acheté un quart de queue Kawai. Dans mes souvenirs, il n’était pas mal pour un piano droit!
Mon piano de travail
Je travaille sur le même piano depuis mes 11 ans. Il est un peu fatigué comme vous pouvez l’imaginer ! C’est un piano dont j’ai du mal à me séparer pour des raisons sentimentales. Il m’a accompagné dans toutes les étapes de ma vie de musicien, notamment lors de cette période intense pendant laquelle je préparais le CNSM de Paris. Il porte donc en lui toute mon histoire pianistique. Sur le plan sonore, même s’il a besoin d’un bon lifting, je dirais que c’est un piano plutôt souple, avec des aigus aujourd’hui difficiles à émettre.

Crédit photo : David Fray
C’est un point positif en réalité, car cela force à travailler l’équilibre sonore, notamment entre les aigus et les basses. Il y a en effet un déséquilibre presque structurel au piano, avec des basses naturellement plus bruyantes que les aigus. Ce trait est très exagéré sur le mien et me pousse à constamment rééquilibrer les choses. Vous savez, il y a deux écoles. Ceux qui ont un piano au niveau de ce qu’ils peuvent trouver sur scène, et ceux qui ont un instrument un peu rétif. J’avoue appartenir à cette deuxième catégorie ! Je préfère un piano qui me force à trouver une forme d’adaptabilité permanente, dans la mesure où chaque concert nous amène à nous acclimater à un instrument différent.
Mon piano idéal
J’ai rencontré des pianos sur scène avec lesquels j’aurais bien fait un bout de chemin… Cependant, je pense que le piano idéal n’existe pas, car à chaque moment de votre vie, voire de votre journée, selon le répertoire que vous jouez, vos demandes et vos attentes ne seront pas les mêmes. Le réglage du technicien, l’atmosphère du lieu de représentation, le caractère plutôt harmonique ou contrapuntique de l’instrument sont par ailleurs autant de variables essentielles relativement au jeu de tel ou tel répertoire. Pour Bach, j’aime les pianos qui ont un certain âge et qui n’ont pas forcément des harmoniques très riches de fait.
Le piano pour jouer Bach
Je travaille depuis plusieurs années avec Cyril Mordant de Régie Pianos. Pour les Variations Goldberg j’ai privilégié un instrument avec une certaine clarté polyphonique, qui chante et possède un grand nombre de couleurs. En enregistrant cette œuvre, j’ai eu l’obsession d’ôter tout caractère aléatoire aux enchaînements de variations, chacune devait être « enfantée » par la précédente de manière évidente et organique.