Dans ce numéro est appelée à la barre Julia Cagé. L’économie n’est pas le seul domaine où cette enseignante, chercheuse et essayiste excelle : elle pratique le piano à haut niveau depuis l’enfance.

Votre premier souvenir musical ?

Moi devant un piano, à 6 ans, avec cette professeure qui enseignait au bâton (ce qui me convenait parfaitement, étant donné mon caractère) !

Votre plus beau souvenir musical ?

Un premier prix à l’unanimité gagné avec ma soeur, au violoncelle, et d’autres amis du conservatoire. Nous avions présenté le Quintette pour piano et cordes de César Franck, et avions joué, sans que je puisse encore l’expliquer, au-dessus de notre niveau. J’ai rarement ressenti une telle joie !

Votre dernière réflexion sur la musique ?

J’ai l’oreille parfaitement absolue. Mais comme je chante pour autant faux, je l’entends, et c’est très désagréable !

L’oeuvre qui vous donne de l’énergie ?

Les Études op. 42 n° 5 et op. 8 n° 12, de Scriabine.

Le chef-d’oeuvre qui vous ennuie ?

Les Vingt regards sur l’Enfant-Jésus, de Messiaen… que j’ai pourtant joués !

Le morceau que vous pourriez jouer au pied levé ?

Les 4e et 6e Moments musicaux op. 16, de Rachmaninov.

Le morceau que vous rêveriez de jouer en public ?

Le Premier Concerto pour piano op. 11, de Chopin.

La salle de concert dans laquelle vous rêveriez de le jouer ?

À New York, au Carnegie Hall !

Le dernier concert auquel vous avez assisté ?

La Flûte enchantée de Mozart, à l’Opéra Bastille. Et moi qui ne parle pas un mot d’allemand, j’ai enfin pu prendre le temps de comprendre l’histoire grâce aux surtitres !

Quel morceau faudrait-il recommander pour convaincre d’aimer ou de se réconcilier avec la musique classique ?

La Marche turque de Mozart. Mon grand-père me demandait régulièrement de la lui jouer, et comme ça le mettait immanquablement en joie, je l’associe depuis à un pur moment de plaisir !

Comment transmet-on le goût de la musique classique ?

Je n’ai pas la réponse – elle dépend sans doute des caractères des uns et des autres – mais une condition préalable serait de laisser à chacun la liberté de découvrir la musique à son rythme.

Les trois compositeurs que vous inviteriez à votre dîner idéal ?

Debussy, Franck et Bach.

Les trois interprètes ?

Martha Argerich, Samson François et Brigitte Engerer, avec qui j’avais fait une masterclasse et qui m’avait beaucoup impressionnée !

Et s’il fallait rendre un hommage ?

La pianiste et professeure Nathalie Béra-Tagrine que j’ai rencontrée vers 20 ans et qui a radicalement changé ma manière d’envisager le piano. Je lui dois de m’avoir appris à prendre le temps d’aller au fond des oeuvres…

Julia Cagé
Photo : Céline Bansart