Premiers Prix des Concours de Rome et d’Épinal, le jeune Français compte parmi les très prometteurs élèves de Rena Shereshevskaya.
Une famille russe installée à Nice au début des années 1990, violoniste dans ses deux branches depuis des générations : Slava Guerchovitch aurait pu être tenté par l’archet. Aucunement : ses parents imaginent même un temps que l’enfant ne s’inscrira pas dans la tradition musicale de la famille. C’est sans compter sur sa rencontre, à un peu plus de 6 ans, avec le piano. Il entre bientôt à l’Académie de musique de Monaco – son père est alors violoniste au sein de l’Orchestre philharmonique du Rocher – dans la classe de Michael Desjardins avec lequel il va étudier pendant sept ans. En parallèle, il rencontre divers pédagogues inscrits dans la tradition russe (Lily Dorfman, Slava Poprugin, Igor Lazko). L’un de ses plus éminents représentants, Sviatoslav Richter, le fascine littérale- ment depuis que, tout gamin, il a découvert le célèbre documentaire de Bruno Monsaingeon (Richter, l’Insoumis, 1998, NVC Arts).
Deux disques en 2023
Le moment de tenter le CNSMDP est venu. Pari gagné ! À 16 ans, Slava Guerchovitch entre chez Michel Béroff. Une période enri- chissante s’ouvre, marquée en outre par le travail avec Hortense Cartier-Bresson, Prisca Benoit, Fernando Rossano ou Laurent Cabasso, un professeur « particulièrement disponible et attentif ». Reste que la grande rencontre est encore à venir. En 2019, à Hambourg, il participe à un stage de Rena Shereshevskaya. La célèbre pédagogue lui propose de venir étudier à Rueil-Malmaison ; une relation particulièrement fructueuse se noue, qui se prolonge depuis 2021 à l’École normale Alfred Cortot.

Crédit photo : David Gerchovitch
Le travail avec Rena Shereshevskaya ? « Il y a tant de choses à dire… », glisse le jeune homme, avant de mettre d’abord l’accent sur « la lecture, d’une précision presque paranoïaque, de la partition ». « J’ai été très frappé par cet aspect lors du travail sur Après une lecture de Dante, par son attention à des détails, microscopiques en apparence, qui changent tout lorsqu’on y prend garde. » Cette perception renouvelée du texte doit beaucoup aussi à l’importance que Shereshevskaya accorde à la pédalisation, « dimension du jeu qui m’obsède quelque peu désormais », reconnaît son élève. Maître d’un matériau sonore qu’il vit intensément, l’artiste est bien conscient de sa dette envers une professeure qui « apprend à bien timbrer, à jouer au fond du clavier et à obtenir un son qui ne “crie” pas et porte jusqu’aux derniers rangs de la salle ».
Dans les premiers mois de 2023, on découvrira les deux disques que le pianiste vient de mettre en boîte pour le label 21Music, avec le soutien de la fondation monégasque Sancta Devota – dont il vient d’être nommé ambassadeur. Un récital réunit Bach, Ravel et Liszt. L’autre, tout ravélien, est partagé avec son frère aîné David (aujourd’hui 1er violon de l’Orchestre symphonique de Berne) et comprend la Sonate pour violon et piano n° 2 et Tzigane, pièces pour lesquelles François Dru, responsable de la Ravel Édition, leur a donné accès à de précieux documents. On y trouvera aussi la rare transcription pour piano solo du ballet Ma Mère L’Oye, signée Jacques Charlot.