Quelle est la genèse de votre duo ?
Lidjia : Le duo n’a pas été pour nous une évidence. Pendant longtemps nous n’avons pas pu jouer ensemble : Sanja, de douze ans ma cadette, était trop petite. L’idée est venue des autres, quand Sanja a fini le CNSM, à 15 ans.
Enfants, on apprend qu’il faut partager avec ses frères et sœurs. Comment partagez-vous le piano et l’espace sonore ?
L. : Le quatre-mains demande de partager son territoire. C’est étrange physiquement et musicalement : l’une joue les aigus, l’autre les graves, sans parler des mains qui se croisent ! Les positions sont inconfortables. Je dirai que le jeu à quatre-mains c’est trop proche et le jeu à deux-pianos c’est trop loin.
Sanja : Le problème avec le deux-pianos, c’est que l’on ne s’entend pas très bien.
L. : Il ne faudrait faire plus qu’un alors que nous sommes si éloignées. C’est inhumain ! Mauricio Kagel met en scène cette difficulté : pour son Capriccio, les pianos sont alignés de sorte que l’un des pianistes tourne le dos à l’autre.

Crédit photo : Marco Borggreve.
Comment deux sœurs travaillent-elles ensemble ?
S. : C’est difficile de s’entraîner ensemble au deux-pianos. Lidjia a la chance d’avoir chez elle deux pianos mais ils ne sont pas dans la même pièce. Il faut alors déplacer le piano droit dans la salle du piano à queue et travailler ainsi pendant quelques jours intensément.
L. : Et lorsque l’on joue avec sa sœur, le dialogue est très libre ! C’est à double tranchant : le manque de diplomatie est dur mais permet d’avancer vite et sans équivoque. Sans diplomatie, on peut provoquer des guerres…
S. : … ou des révolutions !